Lecture Bonus (pour celles et ceux qui ont déjà fait le texte d'A. de Vigny)

Extrait de Notre Dame de Paris

(Victor Hugo 1802 - 1885)

La bohémienne

La scène que tu vas lire est extraite d’un des chefs-d’œuvre que le grand écrivain français Victor Hugo écrivit en 1831. Elle se passe à Paris en 1482, le jour des Rois et de la Fête des Fous.

Les phrases sont parfois longues. N'hésite pas à t'arrêter souvent et à te représenter mentalement ce que tu viens de lire.

Lorsque Pierre Gringoire arriva sur la place de Grève, il était transi[1]. [...] Aussi se hâta-t-il de s'approcher du feu de joie qui brûlait magnifiquement au milieu de la place. Mais une foule considérable faisait cercle à l'entour.

[...]

En examinant de plus près, il s'aperçut que le cercle était beaucoup plus grand qu'il ne fallait pour se chauffer au feu du roi, et que cette affluence de spectateurs n'était pas uniquement attirée par la beauté du cent de bourrées[2] qui brûlait.

 
Dans un vaste espace laissé libre entre la foule et le feu, une jeune fille dansait.

 
Si cette jeune fille était un être humain, ou une fée, ou un ange, c'est ce que Gringoire ne put décider dans le premier moment, tant il fut fasciné[3] par cette éblouissante vision.

 
Elle n'était pas grande, mais elle le semblait, tant sa fine taille s'élançait hardiment. Elle était brune, mais on devinait que le jour sa peau devait avoir ce beau reflet doré des Andalouses[4] et des Romaines. [...] Elle dansait, elle tournait, elle tourbillonnait sur un vieux tapis de Perse, jeté négligemment sous ses pieds ; et chaque fois qu'en tournoyant sa rayonnante figure passait devant vous, ses grands yeux noirs vous jetaient un éclair.

 
Autour d'elle, tous les regards étaient fixes, toutes les bouches ouvertes ; et en effet, tandis qu'elle dansait ainsi, au bourdonnement du tambour de basque que ses deux bras ronds et purs élevaient au-dessus de sa tête, mince, frêle et vive comme une guêpe, avec son corsage d'or sans pli, sa robe bariolée qui se gonflait, avec ses épaules nues, ses jambes fines que sa jupe découvrait par moments, ses cheveux noirs, ses yeux de flamme, c'était une surnaturelle créature.

- En vérité, pensa Gringoire, c'est une salamandre, c'est une nymphe, c'est une déesse !

 
En ce moment, une des nattes de la chevelure de la " salamandre " se détacha, et une pièce de cuivre jaune qui y était attachée roula à terre.

 
- Hé non ! dit-il, c'est une bohémienne[5].

Toute illusion avait disparu.

Elle se remit à danser. Elle prit à terre deux épées dont elle appuya la pointe sur son front et qu'elle fit tourner dans un sens tandis qu'elle tournait dans l'autre. C'était en effet tout bonnement une bohémienne. […] Le feu de joie l'éclairait d'une lumière crue et rouge qui tremblait toute vive sur le cercle des visages de la foule, sur le front brun de la jeune fille.

[…]

La jeune fille, essoufflée, s'arrêta enfin, et le peuple l'applaudit avec amour.

- Djali, dit la bohémienne.

 
Alors Gringoire vit arriver une jolie petite chèvre blanche, alerte, éveillée, lustrée, avec des cornes dorées, avec des pieds dorés, avec un collier doré, qu'il n'avait pas encore aperçue, et qui était restée jusque-là accroupie sur un coin du tapis et regardant danser sa maîtresse.

- Djali, dit la danseuse, à votre tour.

 
Et s'asseyant, elle présenta gracieusement à la chèvre son tambour de basque.

 
- Djali, continua-t-elle, à quel mois sommes-nous de l'année ?

La chèvre leva son pied de devant et frappa un coup sur le tambour. On était en effet au premier mois. La foule applaudit.

- Djali, reprit la jeune fille en tournant son tambour de basque d'un autre côté, à quel jour du mois sommes-nous ?

 
Djali leva son petit pied d'or et frappa six coups sur le tambour.

- Djali, poursuivit l'Égyptienne toujours avec un nouveau manège du tambour, à quelle heure du jour sommes-nous ?

 
Djali frappa sept coups. Au même moment l'horloge de la Maison-aux-Piliers sonna sept heures.

Le peuple était émerveillé.

[…]

La bohémienne se retourna encore une fois, elle pirouetta sur le talon, et se mit à recueillir dans un tambour de basque les dons de la multitude.

Victor Hugo – Notre Dame de Paris

Questionnaire

1.      Quel jour de l'année 1482 cette scène se déroule-t-elle ?

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2.      Par qui l'attention de Pierre Gringoire est-elle tout d'abord attirée ?

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3.      Qui est Djali ?

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4.      Pour quelle raison Pierre Gringoire pense-t-il que la danseuse est une Tsigane ?

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5.      Quels accessoires la danseuse utilise-t-elle au cours de sa danse ?

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6.      Peux-tu relever dans le texte un passage qui montre que le public est captivé par le spectacle auquel il assiste ?

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7.      Si tu avais été la bohémienne, aurais-tu choisi le même endroit qu'elle pour présenter tes numéros ? Pourquoi ?

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8.    Les spectateurs ont-ils payé avant d'assister au spectacle ? Comment le sais-tu ?

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Un paragraphe du texte décrit la bohémienne en train de danser. Pourrais-tu la dessiner ? Essaie de n'oublier aucun élément de la description.
(tu peux faire ce dessin sur une feuille.) 

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[1]    Pierre Gringoire était transi : il était saisi de froid.

[2]    Un cent de bourrées, c'est une centaine de fagots.

[3]    Pierre Gringoire était fasciné : il était attiré, hypnotisé par ce qu'il voyait.

[4]    Les Andalouses sont les habitantes de l'Andalousie, une région du sud de l'Espagne dont la capitale est Séville.

[5]    À l'époque de Victor Hugo, on appelait les Tsiganes nomades des bohémiens.

Correction du texte "La bohémienne"

1.      Quel jour de l'année 1482 cette scène se déroule-t-elle ?

Cette scène a lieu le 6 janvier.

2.      Par qui l'attention de Pierre Gringoire est-elle tout d'abord attirée ?

Son attention est attirée par une jeune fille qui danse.

3.      Qui est Djali ?

C'est la chèvre "savante" de la bohémienne.

4.      Pour quelle raison Pierre Gringoire pense-t-il que la danseuse est une Tsigane ?

Il a vu une pièce de cuivre rouge tomber de sa chevelure.

5.      Quels accessoires la danseuse utilise-t-elle au cours de sa danse ?

Elle utilise un tambour de basque et deux épées.

6.      Peux-tu relever dans le texte un passage qui montre que le public est captivé par le spectacle auquel il assiste ?

Le texte précise que, autour de la jeune fille qui dansait, "tous les regards étaient fixes, toutes les bouches ouvertes". Cela montre que toute l'attention des spectateurs est concentrée sur elle.

7.    Si tu avais été la bohémienne, aurais-tu choisi le même endroit qu'elle pour présenter tes numéros ? Pourquoi ?

Oui, pour avoir le maximum de spectateurs j'aurais choisi, comme la bohémienne, de me placer près du feu : c'est à cet endroit que les gens étaient les plus nombreux car ils s'y étaient rassemblés pour se réchauffer.

8.      Les spectateurs ont-ils payé avant d'assister au spectacle ? Comment le sais-tu ?

Non, mais c'est à la fin du spectacle que la bohémienne recueille dans son tambour de basque l'argent que les spectateurs souhaitent lui donner.